Au fait, comment ma main avait-elle échoué sur cette plage déserte à l'époque où l'errance cousait des mots dans l'infini? Comment ma main en creusant dans le sable avait-elle ressuscité cette pierre naufragée? Midi cognait sur la plage, et les récifs et barques tremblaient sous la lumière blanche. J'ai scruté le large, cherchant à identifier vers quel continent orienter mon voyage. J'ai écouté le souffle du vent, plein de ces odeurs puissantes qui multipliaient mon courage. Des oiseaux sont arrivés de plus en plus nombreux. J'ai fermé les yeux et je compris que j'étais là où je voulais être. Que j'y étais comme un gant tourné à l'envers. Alors j'ai marché jusqu'au port, au milieu de la cité. Je me suis installé au café. Le patron a rempli mon verre et je me suis mis à écrire ... une lettre à mon père. Le lendemain j'en écrivis une autre et chaque jour une nouvelle. Je racontais des trucs, n'importe quoi, ce qui me passait par la tête et la lettre terminée je la déposais à la poste. J'ignorais son adresse, je l'inventais à chaque fois, dans une ville nouvelle. Ce qui était difficile c'était la première phrase, celle qui donnait du sens à cet échange par-delà le temps et l'espace. « Quand je t'ai vu la dernière fois, tu étais en train de mourir. » Cette scène récurrente, comme les étoiles de mer sous ma plume, je l'ai explorée dans tous ses contours jusqu'à la vider de sa substance obscure pour me retrouver intacte sur la feuille blanche de ma vie.
Nita
Grandiose....
RépondreEffacerCygne blanc