samedi 3 mars 2018

Intersticiel

Je me glisse dans l’interstice entre les choses de la vie. Je suis l’inattendu qui frappe à la fenêtre en pleine nuit pour te rappeler à l’espace ouvert de l’autre côté du réel. Je me tiens dans l’immobilité du vent quand il se penche sur ton sommeil et sourit. Je brûle dans la fièvre qui saisit les amants quand ils pressentent la venue de l’aube assassine de tous les lendemains. Je te nargue dans la main tendue que tu ignores sans savoir combien elle te serait douce si seulement tu l’embrassais. Je suis l’inopportun que jamais tu n’envisages car je demeure derrière la prunelle de tes yeux, où je t’espère patiemment. Je me retrouve sans trêve dans le rire de l’enfant qui réchauffe la vieille âme entrée en agonie. Je t’invite à te fondre dans le balancement lent des branches qui déshabille le temps pour rejoindre le scintillement heureux de la rivière. Je luis dans le sexe nu qui s’offre, impudique comme l’immensité vierge de l’océan. Je suis le remède inaccessible à tous vos maux ; je suis partout et cependant nul ne saurait me saisir car je coule comme la lumière qui danse vertigineuse dans l’eau. Je m’agenouille en prière muette dans l’étonnement qui suit la fulgurance radiante au creux des reins, dans l’éblouissement de la première étreinte. Je vibre dans le regard du fauve qui entrevoit la liberté et dévore sans état d’âme le rouge soleil du matin. Je suis l’invisible autour duquel le monde tourne depuis toujours, sans lequel il s’affaisserait sur lui-même comme une toupie sans élan, désertée par le frémissement du vivant.

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