dimanche 30 septembre 2018

Préparatifs

Ne perds jamais espoir,
mon cœur,
des miracles se préparent
dans l’invisible.

Rûmi

samedi 29 septembre 2018

Soumission passionnée

Le principe de mon travail est une soumission passionnée à l'objet qui m'occupe, auquel, en d'autres mots, mon amour appartient.

Rainer Maria Rilke

jeudi 27 septembre 2018

mardi 25 septembre 2018

Rivière et fleuve


Où rivière et fleuve
Ont leurs larmes mêlées
leurs sangs confondus

S’ouvre le val d’attente
Aux saisons défuntes
aux herbes renaissantes

Tout est retrouvaille
Tout est épousailles
la vie s’offre à nu

S’envole l’hirondelle
Changeant brume et nuage
en aérienne extase

François Cheng

lundi 24 septembre 2018

Blessure éternelle


Ce que les nazis ont fait aux juifs n'est rien que l'on puisse dater et inscrire dans la longue chaîne de l'Histoire, ce n'est rien de passager ni de localisé en un seul pays, c'est un fait absolu, une blessure éternelle dans la chair terrestre du temps, c'est ce que l'humanité a fait à toute l'humanité, c'est ce que l'humanité s'est fait à elle-même. Le mal perpétré par un seul homme souille tous les autres hommes, de même que les larmes versées par un seul lavent tous les autres. Le meurtre comme la bonté engagent à chaque fois l'humanité entière, la sauvent et la perdent à chaque fois.

Christian Bobin

dimanche 23 septembre 2018

Main noire


Il y a ce poids qui s'alourdit avec la nuit, cette fatalité indécente de la poésie. Il y a le rempart fragile de l'enfance devant la marée du chagrin. Il y a le clinquant absurde de l'ordre marchand qui me met des chaines aux pieds et veut monnayer mon rêve. Il y a ces raisons qui me sont servies froides et un peu rancies de rétrécir la vie jusqu'à en faire un horizon minuscule. Il y a le scalpel de ton absence qui grave des arabesques dorées sur mon cœur obsidienne. Il y a les lignes de fuite brûlantes du désir qui dessinent un ailleurs impossible sous la couverte du silence. Il y a cette main noire qui tendrement ramasse les dés de l'existence et les relance, comme si tout pouvait recommencer...

samedi 22 septembre 2018

Je suis

Je suis le jour. Je suis la nuit. Et je suis ce qui les tient ensemble. Je suis le vent qui tourbillonne, je suis la vague qui meure en embrassant le rocher, et je suis l'océan avec son parfum d'infini. Je suis le goéland qui trace une route invisible dans le ciel, et je suis le goût de grand large que les embruns viennent déposer sur ta bouche. Je suis tout ce que je ne suis pas tandis que m'effaçant, je livre passage à ce qui est... sans moi.

vendredi 21 septembre 2018

Intériorité


Je ne peux rien te donner
qui n'ait déjà son existence
à l'intérieur de toi...
Je ne peux te proposer
d'images que les tiennes...
Je t'aide à rendre visible
ton propre univers...
C'est tout...


Herman Hesse

jeudi 20 septembre 2018

Aurore inattendue

Je marche dans la nuit sur des traces qui deviennent lumineuses quand je ferme les yeux. Je marche dans la vie sur un fil tissé de rêves aveugles où se reflètent le ciel ardent et les étoiles rieuses. Je marche dans le vide avec le regard tourné en dedans vers ta beauté, cette aurore toujours inattendue.

mercredi 19 septembre 2018

Bateaux sans équipage

Chaque objet se ferme et résonne
Mes outils démoniaques me tachent.
Sur des bateaux sans équipage
   nous profanons le paysage d'un secret
L'infini n'arrivera pas jusqu'à nous.

François Charron

mardi 18 septembre 2018

Alchimie essentielle


Nous labourerons les terres obscures de la nuit. Nous travaillerons le chaos à mains nues, laissant la matière pénétrer les pores de notre peau jusqu'à la rendre translucide. Nous sèmerons nos amours mortes dans le cœur immobile du temps. Nous les irriguerons de notre impatience infiniment patiente. Nous traverserons intacts l'opacité de l'instant. Nous récolterons enfin les soleils dansants qui éclaireront demain.

jeudi 13 septembre 2018

Ni manifesté, ni caché


Comment pourrai-je toujours exprimer Cette Vérité ? 
Comment puis-je dire: "Il n'est pas ceci, ni cela " 
Si je dis qu'il est en moi, le monde est incrédule, 
Si je dis qu'il est au-dehors de moi, c'est mentir. 
Il rend le monde intérieur et extérieur comme un tout indivisible : 
le visible et l'invisible sont ses marchepieds. 
Il n'est ni manifesté,  ni caché. 
Il n'est ni révélé, ni non révélé. 
Il n'y a rien en vérité qui puisse exprimer ce qu'il est.

Kabir

mercredi 12 septembre 2018

Le rire du jardinier

J'ai couru au jardin et j'ai cueilli une rose.
Je craignais d'être vu par le jardinier.
J'entendis la voix du jardinier me dire :
Qu'est-ce qu'une rose, je te donnerai tout le jardin.

Rûmi

mardi 11 septembre 2018

Hors du paradis

Un jour on sort du paradis et on voit ce qu'est le monde : un palais pour les menteurs, un désert pour les purs.

Christian Bobin

lundi 10 septembre 2018

Neti, Neti


Neti, Neti.. Ni ceci ni cela...L'esprit humain ne peut pas Le saisir. Seul l'être vide de toute illusion et de toute Vérité autre que celle-ci peut selon sa grâce l'incarner.

Yakob Asclepios Saladdin

dimanche 9 septembre 2018

Fontaine de jouvence


Nous avons traversé les ténèbres de l'océan et l'immensité de la terre. Nous avons enfin trouvé la fontaine de jouvence. Elle nous attendait patiemment au cœur de nous-mêmes.

Rûmi

samedi 8 septembre 2018

Changer de vie

Trois mots donnent la fièvre. Trois mots vous clouent au lit : changer de vie. Cela c'est le but. Il est clair, simple. Le chemin qui mène au but, on ne le voit pas. La maladie c'est l'absence de chemin, l'incertitude des voies. On n'est pas devant une question, on est à l'intérieur. On est soi-même la question. Une vie neuve, c'est ce que l'on voudrait mais la volonté, faisant partie de la vie ancienne, n'a aucune force. On est comme ces enfants qui tendent une bille dans leur main gauche et ne lâchent prise qu'en s'étant assurés d'une monnaie d'échange dans leur main droite : on voudrait bien d'une vie nouvelle mais sans perdre la vie ancienne. Ne pas connaître l'instant du passage, l'heure de la main vide.

Christian Bobin

vendredi 7 septembre 2018

Création quotidienne


Pour les lois de la thermodynamique et de l'entropie, tout ce qui est créé est entraîné tôt ou tard de l'ordre au désordre. Tout finit bien sûr par s'affaiblir et se débiliter, tout ce qui était juste devient faux avec le temps, tout ce qui était beau et lisse se craquelle... Mais au lieu de nous en affliger, nous devrions voir là la sagesse primordiale de la création qui ne nous livre pas une fois pour toutes un réel achevé, parfait et durable, mais nous invite en permanence, dans le respect des lois ontologiques et des structures d'un ordre de l'amour, à réactualiser, à remettre à neuf ce qui s'étiole, à réinventer des contenants et des contenus, à faire que soit neuf ce qui était hier usé, que soit étincelant ce qui était hier terni. Nous sommes en permanence nécessaires à la création quotidienne du monde. Nous ne sommes jamais les gardiens d'un accompli mais toujours les cocréateurs d'un devenir.

Christiane Singer

jeudi 6 septembre 2018

Fleurs verticales







Je t'offrirai un bouquet de fleurs verticales pour éclairer en dedans, au profond de la nuit que tu portes comme on porte une vie à naître. Elles seront cri. Elles seront bruit de l'âme qui se déplie après avoir été trop longtemps à l'étroit. Elles seront musique quand l'étoile qui en toi veut danser déploiera ses ailes pour rejoindre ses sœurs - enfin libre !


mercredi 5 septembre 2018

Ballons sur le nez

Ça vaut pas la peine 
De laisser ceux qu'on aime 
Pour aller faire tourner 
Des ballons sur son nez 
Ça fait rire les enfants 
Ça dure jamais longtemps 
Ça fait plus rire personne 
Quand les enfants sont grands .

Beau dommage.




mardi 4 septembre 2018

Maison ouverte


Le solitaire est celui qui n'est plus jamais seul parce que toutes choses viennent à lui trouver leur nom. Il est comme une petite maison dans la forêt, si ouverte au silence que les bêtes sauvages ne craignent pas d'y entrer.

Christian Bobin

lundi 3 septembre 2018

Horizon écarlate


Un oiseau plonge dans l'horizon écarlate.
Le suivant des yeux, elle demande :
Jusqu'où irons-nous ensemble ?

dimanche 2 septembre 2018

Route brûlante

Le soleil trace une route
qui va brûlante de maintenant à maintenant
sans détour ni retour.

samedi 1 septembre 2018

Recevoir ce qui nous est donné


La légèreté, elle est partout, dans l’insolente fraîcheur des pluies d’été, sur les ailes d’un livre abandonné au bas d’un lit, dans la rumeur des cloches d’un monastère à l’heure des offices, une rumeur enfantine et vibrante, dans un prénom mille et mille fois murmuré comme on mâche un brin d'herbe, dans la fée d’une lumière au détour d’un virage sur les routes serpentines du Jura, dans la pauvreté tâtonnante des sonates de Schubert, dans la cérémonie de fermer lentement les volets le soir, dans une fine touche de bleu, bleu pale, bleu-violet, sur les paupières d’un nouveau-né, dans la douceur d’ouvrir une lettre attendue, en différant une seconde l’instant de la lire, dans le bruit des châtaignes explosant au sol et dans la maladresse d’un chien glissant sur un étang gelé, j’arrête là, la légèreté , vous voyez bien, elle est partout donnée. Et si en même temps, elle est rare, d’une rareté incroyable, c’est qu’il nous manque l’art de recevoir, simplement recevoir ce qui nous est partout donné.

Christian Bobin