dimanche 30 décembre 2018

L'arbre de l'amour


L'amour est un arbre
aux branches
dans le toujours
aux racines
dans l'éternité
et au tronc
nulle part.

Rûmi

samedi 29 décembre 2018

Fils de carcajou


J’ai des gènes de carcajou
Semence d’étoiles et de trous noirs
Rebut de galaxies et de marais
J’erre comme un astre maudit.

J’ai des gènes de carcajou
Tantôt sauvage tantôt joueur
Je cherche d’innocentes victimes 
Plongées dans leur sommeil engourdi.

J’ai des gènes de carcajou
Candide, cruel, stupide et imprévisible
Essentiellement nuisible
Je manifeste le chaos et le Verbe.

J’ai des gènes de carcajou
Grand prêtre de tous les orifices
Déclencheur comique et cosmique
Initiateur de changements.

J’ai hérité de l’esprit du carcajou
De la famille des heyokas et des clowns sacré
Des moines kagyüpas et autre fous de Dieu
Des marginaux, Loki et Hamlet de ce monde.

J’ai des gènes de carcajou
On me craint et on me déteste
Des rumeurs disent que je viens du diable
Partout où je passe, je provoque des accidents.

J’ai des gènes de carcajou
Descendant du premier chaman
Du soma de l’amanite tue-mouches,
Versé dans la rhétorique des paradoxes.

J’ai des gènes de carcajou
J’inverse les pôles
Brouille les directions
La logique et les éléments.

J’ai des gènes de carcajou
Mordant dans les chairs du mensonge
De la fausse vertu et de la fumisterie
Je laisse leurs carcasses fumantes derrière mes pas de danse.

J’ai des gènes de carcajou
Les coyotes, les hyènes et les aigles
Partagent ma solitude
Dans le narthex de mon cœur pleurent les étoiles !

Lug Lavallée

mercredi 26 décembre 2018

La brûlure du soleil

Après un certain temps, vous apprendrez que le soleil peut vous brûler si vous vous y exposez trop longtemps. Vous accepterez même que les bonnes personnes puissent parfois vous blesser, et vous aurez alors besoin de les pardonner. Vous apprendrez que parler peut apaiser les douleurs de l’âme…vous découvrirez que cela prend des années de construire la confiance, et à peine quelques secondes de la détruire, et que vous pourrez aussi faire des choses que vous regretterez toute votre vie.

William Shakespeare

dimanche 23 décembre 2018

Boréale

Une aurore boréale m'a parlé de toi
A déshabillé tes secrets
Et m'a montré tes origines.

Dans la paix retrouvée,
J'ai caressé l'éther de tes yeux
Nous avons souri aux souvenirs angéliques des étoiles

Et je crois que nous avons dansé nos vies
Dans la nuit encerclée par les caribous.

Lug Lavallée

vendredi 21 décembre 2018

A toutes mes relations


Tu es musique
Tes nuages sont sans frontières
Quand ils s’approchent
Leurs odeurs se parfument de brume
Tu danses la pureté des gouttes
Les yeux éteints
Je perçois ta beauté
Tes mélodies
Je dépose du tabac
En offrant sur une pierre
Je te suis redevable 
Pour ma liberté


Joséphine Bacon

jeudi 20 décembre 2018

La poursuite du bonheur


Il est des moments dans la vie où l’on a presque l’impression d’entendre l’ironique froufrou du temps qui se dévide,
Et la mort marque des points sur nous.
On s’ennuie un peu, et on accepte de se détourner provisoirement de l’essentiel pour consacrer quelques minutes à l’accomplissement d’une besogne ennuyeuse et sans joie mais que l’on croyait rapide,
Et puis on se retourne, et l’on s’aperçoit avec écœurement que deux heures de plus ont glissé dans le vide,

Le temps n’a pas pitié de nous.

À la fin de certaines journées on a l’impression d’avoir vécu un quart d’heure et naturellement on se met à penser à son âge,
Alors on essaie d’imaginer une ruse une sorte de coup de poker qui nous ferait gagner six mois et le meilleur moyen est encore de noircir une page,
Car sauf à certains moments historiques précis et pour certains individus dont les noms sont écrits dans nos livres,
Le meilleur moyen de gagner la partie contre le temps est encore de renoncer dans une certaine mesure à y vivre,
Le lieu où nos gestes se déroulent et s’inscrivent harmonieusement dans l’espace et suscitent leur propre chronologie,
Le lieu où tous nos êtres dispersés marchent de front et où tout décalage est aboli,
Le lieu magique de l’absolu et de la transcendance
Où la parole est chant, où la démarche est danse
N’existe pas sur terre,

Mais nous marchons vers lui.

Michel Houellebecq

dimanche 16 décembre 2018

Dans ta chambre de verre


Dans ta chambre de verre
précieux instants
précise l'heure de notre rendez-vous
celle où le soleil frappe
juste avant le reflet des arbres
celle où nos regards vacillent
à l'horizon d'un autre monde

toi dans ta chambre de verre
moi au jardin
je ne perçois pas ton souffle 
je le pressens
au balancement des gerberas
il perpétue le mien

un rare papillon se pose
sur ma main  contemplation 
miroitement
il est aussi dans la tienne
l'autre main
le soleil darde de ses rayons
la pointe de ses ailes
la paume de nos mains
au berceau du hara

tu t'élèves
je demeure
Eleorah

Cygne blanc


mardi 11 décembre 2018

Fleur de barricade

Louise Michel

Tu es la muse des pauvres gueux

Ton visage est noir de fumée
Tes yeux sentent la fusillade
Tu es une fleur de barricade
Tu es la Vénus
Des meurt-de-faim tu es la maîtresse
De ceux qui n’ont pas de chemise
Les gueux qui vont sans souliers
Les sans-pain, les sans-lit
Ont tes caresses
Mais les autres te font roter
Les gros parvenus et leurs familles
Les ennemis des pauvres gens
Car ton nom, toi, ô sainte fille
Est Liberté


vendredi 30 novembre 2018

Le survivant


Est-ce le vent
est-ce mon ange
diable on cogne

si l'humanité a disparu
qui peut bien s'intéresser
à moi

est-ce le vent
est-ce mon ange
diable 

devrais-je ouvrir
et dans quelle tenue
je suis si bien là
dans mon fauteuil

si je me lève
le retrouverais-je
tout a tellement disparu

je suis un survivant
le Survivant
le seul l'unique

je peux dire et faire
tout ce que je veux
on ne me contredira pas
même les dieux n'ont plus 
ce privilège

on cogne à nouveau
est-ce lui
non je ne bougerai pas
c'est moi le Maître désormais
personne ne me forcera à répondre
je ne réponds que de moi 
à moi-même 

d'ailleurs je n'en ai pas le temps
le Temps aussi a été emporté
avec tous ces disparus 

comment puis-je
ne serait-ce qu'envisager
me rendre à la porte
si je ne peux plus compter
sur le temps qui m'en sépare 

non je reste là 
dans mon fauteuil

oui on a cogné
mais était-ce avant
pendant ou après

puisque le temps n'est plus
je ne peux situer l'instant
où l'on a frappé
peut-être même que l'on n'a 
jamais frappé à cette porte

à moins que ce soit 
le Temps 
lui-même
qui me revienne

Cygne blanc

mercredi 28 novembre 2018

lundi 26 novembre 2018

Feu d'en bas


Ne crains pas d’attiser ton feu d’en bas. C’est lui qui éveille le cœur et fait les pensées lumineuses !

Henri Gougaud

lundi 19 novembre 2018

Ange

Un tableau de JmRaynaud

Est un ange celui qui - animal, poème ou humain - remet la vie en vie.

Christian Bobin

jeudi 18 octobre 2018

mercredi 17 octobre 2018

Tête emplumée


Au réveil je vérifie
où a-il la tête
il est parti
sans dire 
sans faire 
sans jouir

au creux de l'oreiller 
l'empreinte
et quelques cheveux
que je m'empresse
de rassembler

je vérifie alors
la pression atmosphérique
la chaleur des draps
les reflets de l'extérieur

il est parti 
sans se couvrir
sans boire et manger
sans but

je vérifie alors
le ruban de ses chapeaux
le son du frigidaire
l'absence du connu

où as-tu mis ta tête
réponds-moi
embrasse-moi
crie 

ta tête je l'ai vue
dans ton regard
elle voyage 
sans mot
sans chapeau
pleine d'oiseaux

tête de poète
tête emplumée

Cygne blanc

mardi 16 octobre 2018

Limpidité


J'ai toujours su que nous n'étions pas encore nés, que le monde était une matrice avant le vrai ciel, au-delà des sombres nuages. La vie est à gagner, la limpidité à conquérir. La plupart des hommes sont dans les brumes et ne le voient pas.

Christian Charrière, le maître d'âme

lundi 15 octobre 2018

Ami intérieur

Pour chaque âme individuelle, il y a un maître intérieur qui, tout au long d'une existence terrestre assume envers elle une sollicitude et une tendresse particulières. C'est lui qui l'initie à la connaissance, la protège, la guide, la défend, la réconforte, la fait triompher. Cet être, plein de mystère, d'intelligence et d'amour, les anciens le nommaient la Nature Parfaite. Et c'est cet ami, ce défenseur et protecteur, qu'en langue religieuse on appelle l'Ange.

Abd-ûl Haquîqî

dimanche 14 octobre 2018

Miroir brisé


La vérité est un miroir tombé de la main de Dieu et qui s'est brisé.
Chacun en ramasse un fragment et dit que toute la vérité s'y trouve.

Rûmi

samedi 13 octobre 2018

Mur de briques


L'illusion de la liberté continuera aussi longtemps qu'il est profitable de faire perdurer cette illusion. Lorsque cette illusion sera trop coûteuse à maintenir, ils débarrasseront la scène, déferons les rideaux et vous verrez le mur de briques au fond du théâtre.

Frank Zappa 

vendredi 12 octobre 2018

Mille nouveaux visages

Un amour est venu qui a éclipsé tous les amours. Je me suis consumé, et mes cendres sont devenues vie. De nouveau, mes cendres, par désir de brûler, sont revenues et ont revêtues mille nouveaux visages.

Rûmi

jeudi 11 octobre 2018

Lumière intérieure


Si Dieu réside en chaque homme, alors toute forme d'organisation hiérarchique prétendant détenir le monopole du vrai, et dispensant celui-ci de haut en bas, est l'ennemie de l'espèce humaine. Sans preuve de l'existence de cette Lumière intérieure, il ne peut exister de justification rationnelle à l'anarchie. Avec cette preuve (que je détiens), il n'y a pas d'explication rationnelle légitimant la centralisation du pouvoir, ou les États tels que nous les concevons actuellement. Nous serons tous reliés les uns aux autres de toute façon. Il ne saurait en être autrement. Les conséquences sur le plan social sont incalculables, mais dans le bon sens.

Philip K. Dick, l’exégèse

mercredi 10 octobre 2018

Entre deux trains

Ce matin, comme je me perdais un moment dans l'espace improbable entre deux trains, deux vies, soudain des notes de piano ont égrené le silence. Elles ont ruisselé sur mon âme en perles de lumière qui l'ont lavée et rendue à sa nudité première. Tout superflu étant irrémédiablement perdu pour quelques instants, j'ai retrouvé alors ton sourire qui attendait au fond de mon cœur que je le redécouvre, soleil éclairant du dedans le diamant de l'Être.

mardi 9 octobre 2018

Subtilité

Si tu es à la recherche de la demeure de l'âme, tu es une âme. Si tu es en quête d'un morceau de pain, tu es du pain. Si tu peux saisir le secret de cette subtilité, tu comprendras. Chaque chose que tu recherches, tu l'es.

Rûmi

lundi 8 octobre 2018

Se battre


Ce qu'un Sans Roi doit faire, c'est tout faire pour que l'argent et la gloire n'ait plus pour lui aucune valeur. Savoir qu'il vivra inconnu et mourra pauvre - mais tout faire pour que cette pauvreté soit la fenêtre vers des rapports plus justes, des relations plus belles, et cet anonymat la porte vers des combats plus intenses et des amours plus nobles. Se battre, non pour s'enrichir à la place des chefs mais pour que ceux-ci ne détruisent pas davantage la nature, les animaux et les hommes dans leur projet infernal. Se battre, non parce que nous voulons posséder ce monde illusoire mais parce que c'est la seule façon d'accéder à quelque chose qui ressemble à un destin. Se battre, parce que ce combat est la seule chose qu'ils ne peuvent pas nous prendre ; c'est la seule chose qui ne puisse être négociée.

Pacôme Thiellement, la victoire des Sans Roi

dimanche 7 octobre 2018

Tapis rouge

J'entre doucement dans l'automne de ma vie. À pas lents, comptés, je me glisse sans bruit parmi les ombres qui s'allongent. Les feuilles mortes de nos amours défuntes me font un tapis rouge où l'or du temps se mêle au brun de la terre féconde. J'ai le privilège des larmes qui ravivent la mémoire et arrosent la fleur de lumière. Intacte quoi qu'il arrive, elle traversera l'hiver et te parviendra où que tu sois.

samedi 6 octobre 2018

L'enfer

L’enfer, c’est de toujours faire les choses en s’en foutant. C’est de vivre en pensant à autre chose. L’enfer, c’est de ne jamais être là, mais toujours un peu avant ou un peu après, à regretter quelque chose ou à en attendre une autre. C’est de ne jamais écouter quand on vous parle, parce qu’on s’emmerde partout et qu’il n’y a pas de raison que ça s’arrête. L’enfer, c’est la vie gâchée à attendre la vie, la pensée gâchée à penser autre chose.

Pacôme Thiellement

vendredi 5 octobre 2018

Réintégration


Je pense que la tâche du prochain siècle, en face de la plus grave menace qu'ait connue l'humanité, va être d'y réintégrer les dieux.

André Malraux

jeudi 4 octobre 2018

Petit rien

Il n'a rien  qu'un petit rien
bien enfoui dans sa main
il va souriant
chantonnant à St Germain
on le croise soir et matin
au café du coin

il ne dit rien
il vous sourit
vous tend la main
son regard au loin
vous entraîne

là où les fruits les fleurs
et le labeur  boivent à la chaleur
des pays lointains
là où les baleines les requins
les oursins se côtoient
aux pays marins

là où se trouve celle à qui 
il a tout donné
celle du pays en chemin
cette étrangère
qui vous donne la vie
puis la ravit

il n'a rien  qu'un petit rien
bien enfoui dans sa main
un peu d'eau
un peu de cendre
que du divin

Cygne blanc

mercredi 3 octobre 2018

Redite

Entre rein et cœur, à notre insu
   un filet de souffle circulant
Redit ce que les astres ont tu
   ce que la chair a corrompu

François Cheng

lundi 1 octobre 2018

Rosier enflammé


Tu es dans mon cœur même quand je l'ignore, comme un rosier qui s'enflamme en l'absence du jardinier.

Christian Bobin

dimanche 30 septembre 2018

Préparatifs

Ne perds jamais espoir,
mon cœur,
des miracles se préparent
dans l’invisible.

Rûmi

samedi 29 septembre 2018

Soumission passionnée

Le principe de mon travail est une soumission passionnée à l'objet qui m'occupe, auquel, en d'autres mots, mon amour appartient.

Rainer Maria Rilke

jeudi 27 septembre 2018

mardi 25 septembre 2018

Rivière et fleuve


Où rivière et fleuve
Ont leurs larmes mêlées
leurs sangs confondus

S’ouvre le val d’attente
Aux saisons défuntes
aux herbes renaissantes

Tout est retrouvaille
Tout est épousailles
la vie s’offre à nu

S’envole l’hirondelle
Changeant brume et nuage
en aérienne extase

François Cheng

lundi 24 septembre 2018

Blessure éternelle


Ce que les nazis ont fait aux juifs n'est rien que l'on puisse dater et inscrire dans la longue chaîne de l'Histoire, ce n'est rien de passager ni de localisé en un seul pays, c'est un fait absolu, une blessure éternelle dans la chair terrestre du temps, c'est ce que l'humanité a fait à toute l'humanité, c'est ce que l'humanité s'est fait à elle-même. Le mal perpétré par un seul homme souille tous les autres hommes, de même que les larmes versées par un seul lavent tous les autres. Le meurtre comme la bonté engagent à chaque fois l'humanité entière, la sauvent et la perdent à chaque fois.

Christian Bobin

dimanche 23 septembre 2018

Main noire


Il y a ce poids qui s'alourdit avec la nuit, cette fatalité indécente de la poésie. Il y a le rempart fragile de l'enfance devant la marée du chagrin. Il y a le clinquant absurde de l'ordre marchand qui me met des chaines aux pieds et veut monnayer mon rêve. Il y a ces raisons qui me sont servies froides et un peu rancies de rétrécir la vie jusqu'à en faire un horizon minuscule. Il y a le scalpel de ton absence qui grave des arabesques dorées sur mon cœur obsidienne. Il y a les lignes de fuite brûlantes du désir qui dessinent un ailleurs impossible sous la couverte du silence. Il y a cette main noire qui tendrement ramasse les dés de l'existence et les relance, comme si tout pouvait recommencer...

samedi 22 septembre 2018

Je suis

Je suis le jour. Je suis la nuit. Et je suis ce qui les tient ensemble. Je suis le vent qui tourbillonne, je suis la vague qui meure en embrassant le rocher, et je suis l'océan avec son parfum d'infini. Je suis le goéland qui trace une route invisible dans le ciel, et je suis le goût de grand large que les embruns viennent déposer sur ta bouche. Je suis tout ce que je ne suis pas tandis que m'effaçant, je livre passage à ce qui est... sans moi.

vendredi 21 septembre 2018

Intériorité


Je ne peux rien te donner
qui n'ait déjà son existence
à l'intérieur de toi...
Je ne peux te proposer
d'images que les tiennes...
Je t'aide à rendre visible
ton propre univers...
C'est tout...


Herman Hesse

jeudi 20 septembre 2018

Aurore inattendue

Je marche dans la nuit sur des traces qui deviennent lumineuses quand je ferme les yeux. Je marche dans la vie sur un fil tissé de rêves aveugles où se reflètent le ciel ardent et les étoiles rieuses. Je marche dans le vide avec le regard tourné en dedans vers ta beauté, cette aurore toujours inattendue.

mercredi 19 septembre 2018

Bateaux sans équipage

Chaque objet se ferme et résonne
Mes outils démoniaques me tachent.
Sur des bateaux sans équipage
   nous profanons le paysage d'un secret
L'infini n'arrivera pas jusqu'à nous.

François Charron

mardi 18 septembre 2018

Alchimie essentielle


Nous labourerons les terres obscures de la nuit. Nous travaillerons le chaos à mains nues, laissant la matière pénétrer les pores de notre peau jusqu'à la rendre translucide. Nous sèmerons nos amours mortes dans le cœur immobile du temps. Nous les irriguerons de notre impatience infiniment patiente. Nous traverserons intacts l'opacité de l'instant. Nous récolterons enfin les soleils dansants qui éclaireront demain.

jeudi 13 septembre 2018

Ni manifesté, ni caché


Comment pourrai-je toujours exprimer Cette Vérité ? 
Comment puis-je dire: "Il n'est pas ceci, ni cela " 
Si je dis qu'il est en moi, le monde est incrédule, 
Si je dis qu'il est au-dehors de moi, c'est mentir. 
Il rend le monde intérieur et extérieur comme un tout indivisible : 
le visible et l'invisible sont ses marchepieds. 
Il n'est ni manifesté,  ni caché. 
Il n'est ni révélé, ni non révélé. 
Il n'y a rien en vérité qui puisse exprimer ce qu'il est.

Kabir

mercredi 12 septembre 2018

Le rire du jardinier

J'ai couru au jardin et j'ai cueilli une rose.
Je craignais d'être vu par le jardinier.
J'entendis la voix du jardinier me dire :
Qu'est-ce qu'une rose, je te donnerai tout le jardin.

Rûmi

mardi 11 septembre 2018

Hors du paradis

Un jour on sort du paradis et on voit ce qu'est le monde : un palais pour les menteurs, un désert pour les purs.

Christian Bobin

lundi 10 septembre 2018

Neti, Neti


Neti, Neti.. Ni ceci ni cela...L'esprit humain ne peut pas Le saisir. Seul l'être vide de toute illusion et de toute Vérité autre que celle-ci peut selon sa grâce l'incarner.

Yakob Asclepios Saladdin

dimanche 9 septembre 2018

Fontaine de jouvence


Nous avons traversé les ténèbres de l'océan et l'immensité de la terre. Nous avons enfin trouvé la fontaine de jouvence. Elle nous attendait patiemment au cœur de nous-mêmes.

Rûmi

samedi 8 septembre 2018

Changer de vie

Trois mots donnent la fièvre. Trois mots vous clouent au lit : changer de vie. Cela c'est le but. Il est clair, simple. Le chemin qui mène au but, on ne le voit pas. La maladie c'est l'absence de chemin, l'incertitude des voies. On n'est pas devant une question, on est à l'intérieur. On est soi-même la question. Une vie neuve, c'est ce que l'on voudrait mais la volonté, faisant partie de la vie ancienne, n'a aucune force. On est comme ces enfants qui tendent une bille dans leur main gauche et ne lâchent prise qu'en s'étant assurés d'une monnaie d'échange dans leur main droite : on voudrait bien d'une vie nouvelle mais sans perdre la vie ancienne. Ne pas connaître l'instant du passage, l'heure de la main vide.

Christian Bobin

vendredi 7 septembre 2018

Création quotidienne


Pour les lois de la thermodynamique et de l'entropie, tout ce qui est créé est entraîné tôt ou tard de l'ordre au désordre. Tout finit bien sûr par s'affaiblir et se débiliter, tout ce qui était juste devient faux avec le temps, tout ce qui était beau et lisse se craquelle... Mais au lieu de nous en affliger, nous devrions voir là la sagesse primordiale de la création qui ne nous livre pas une fois pour toutes un réel achevé, parfait et durable, mais nous invite en permanence, dans le respect des lois ontologiques et des structures d'un ordre de l'amour, à réactualiser, à remettre à neuf ce qui s'étiole, à réinventer des contenants et des contenus, à faire que soit neuf ce qui était hier usé, que soit étincelant ce qui était hier terni. Nous sommes en permanence nécessaires à la création quotidienne du monde. Nous ne sommes jamais les gardiens d'un accompli mais toujours les cocréateurs d'un devenir.

Christiane Singer

jeudi 6 septembre 2018

Fleurs verticales







Je t'offrirai un bouquet de fleurs verticales pour éclairer en dedans, au profond de la nuit que tu portes comme on porte une vie à naître. Elles seront cri. Elles seront bruit de l'âme qui se déplie après avoir été trop longtemps à l'étroit. Elles seront musique quand l'étoile qui en toi veut danser déploiera ses ailes pour rejoindre ses sœurs - enfin libre !


mercredi 5 septembre 2018

Ballons sur le nez

Ça vaut pas la peine 
De laisser ceux qu'on aime 
Pour aller faire tourner 
Des ballons sur son nez 
Ça fait rire les enfants 
Ça dure jamais longtemps 
Ça fait plus rire personne 
Quand les enfants sont grands .

Beau dommage.




mardi 4 septembre 2018

Maison ouverte


Le solitaire est celui qui n'est plus jamais seul parce que toutes choses viennent à lui trouver leur nom. Il est comme une petite maison dans la forêt, si ouverte au silence que les bêtes sauvages ne craignent pas d'y entrer.

Christian Bobin

lundi 3 septembre 2018

Horizon écarlate


Un oiseau plonge dans l'horizon écarlate.
Le suivant des yeux, elle demande :
Jusqu'où irons-nous ensemble ?

dimanche 2 septembre 2018

Route brûlante

Le soleil trace une route
qui va brûlante de maintenant à maintenant
sans détour ni retour.

samedi 1 septembre 2018

Recevoir ce qui nous est donné


La légèreté, elle est partout, dans l’insolente fraîcheur des pluies d’été, sur les ailes d’un livre abandonné au bas d’un lit, dans la rumeur des cloches d’un monastère à l’heure des offices, une rumeur enfantine et vibrante, dans un prénom mille et mille fois murmuré comme on mâche un brin d'herbe, dans la fée d’une lumière au détour d’un virage sur les routes serpentines du Jura, dans la pauvreté tâtonnante des sonates de Schubert, dans la cérémonie de fermer lentement les volets le soir, dans une fine touche de bleu, bleu pale, bleu-violet, sur les paupières d’un nouveau-né, dans la douceur d’ouvrir une lettre attendue, en différant une seconde l’instant de la lire, dans le bruit des châtaignes explosant au sol et dans la maladresse d’un chien glissant sur un étang gelé, j’arrête là, la légèreté , vous voyez bien, elle est partout donnée. Et si en même temps, elle est rare, d’une rareté incroyable, c’est qu’il nous manque l’art de recevoir, simplement recevoir ce qui nous est partout donné.

Christian Bobin

jeudi 30 août 2018

Un après-midi d'août


Un après midi d'août
cette chaleur torride
comme j'aime
rien ne bouge ou presque

nue sous ma robe de coton
je retourne à l'état premier      
dans l'incubateur du monde
un peu plus et je sucerais mon pouce
évoquant ma mère  Dieu   vous
   
je me laisse guidée
flottant dans la chaleur tangible
lourde voilure étale

en aveugle
je vous appelle

entendez-vous 
le stridulement des insectes
dans l'immobile été
il scie les barreaux
de mon berceau
il tête mon enfance de miel
et de sauterelles

           essaim d'orage sur les grands foins
on cuit l’œuf au nid de l'aigle

je vous appelle  

battements d'ailes
l'oiseau foudroyé
choit à mes pieds
pluie chaude
de plumes  de sang
mon corps maculé a
votre odeur de souffre
de chair  brûlée

dans la fournaise du monde
la terre cuit
          au nid solaire

Cygne blanc