vendredi 31 juillet 2015

Opacité


Ce qui se tient entre notre vie et nous comme un obstacle c'est nous-mêmes, cet épaississement de nous-mêmes dans nous-mêmes que nous considérons comme une preuve de maturité, une certitude d'existence.
Christian Bobin

jeudi 30 juillet 2015

Eau mouvante


Assis au bord d'un lac, enveloppé de silence, je me laisse glisser dans l'eau mouvante de mes fantaisies. Un jour, je n'en reviendrai tout simplement pas...

mardi 28 juillet 2015

Fardeau

Homme, si tu es encore quelque chose, si tu sais quelque chose, si tu aimes et détestes quelque chose, crois-moi, tu n’en as pas fini avec ton fardeau.
Angelus Silesius

dimanche 26 juillet 2015

Le chemin des nuages blancs


En route vers l'inconnu, en bonne compagnie, qui sait où nous arriverons ? Marchant avec patience sur le chemin des nuages blancs, nous ne saurions nous perdre. Tournant en cercle autour du centre de tout, dansant au gré du vent et des vagues de l'âme, nous reviendrons sûrement au point d'immobilité, là où dans le cœur se conjoignent le temps et l'éternité.

samedi 25 juillet 2015

L'heure de nulle part


Il est l'heure de nulle part
Parfois, il est l'heure de nulle part.
Selon, nous paniquons
Selon, nous cherchons l'horloge, désespérés
ô, le tic tac réconfortant du temps

Parfois, il est l'heure de nulle part
Mais enfin, il est l'heure de nulle part!

Se prendre à bras le corps
Vivre.

Anne-Marie Gill

vendredi 24 juillet 2015

Embrasure


Entre ciel et sable
Le rouge sang 
D'un soleil éclaté
Ile Grenade

Entre ciel et sable
La blessure
L'emprunte d'un pas
L'aile arrachée
Au nuage

Entre ciel et sable
La brûlure
Les Larmes de la mère
langes de l'enfant
Pétrifié

Entre ciel et sable
La déchirure
Au ventre de mer
Cris d'oiseaux 
Nouveaux-nés


                 Entre sable et ciel
Je danse
        Je tangue
                Éclats d'embrun                                 
                                  Aux nues

Je vogue
      Je chavire 
               En toi
                    Tête renversée

Je chemine
             Tombe
                      Dépouillé

Terre assoiffée
                           Océan affamé
                                                     Ciel étoilé

                              Évasion
 
 
 Cygne blanc

jeudi 23 juillet 2015

Sortir de la prison


Un être humain est une partie d'un tout que nous appelons Univers. Une portion limitée dans le temps et dans l'espace. Il s'expérimente lui-même. ses pensées et ses émotions comme quelque chose de séparé du reste, une sorte d'illusion d'optique... de la conscience. Cette illusion est une prison pour nous, nous restreignant à nos désirs personnels et à l'affection de quelques personnes près de nous. Notre tâche doit être de nous libérer nous-mêmes de cette prison en élargissant notre cercle de compassion pour embrasser toutes les créatures vivantes et la nature entière dans sa beauté.
Albert Einstein

mercredi 22 juillet 2015

Joyeux âne...


Le blogue "la joie d'être un âne" fête aujourd'hui 22 juillet son premier anniversaire. 477 textes, dont une centaine de mon cru, environ 20450 visites... c'est beaucoup plus que ce que j'avais alors imaginé. Mais ce qui en ressort, c'est surtout le plaisir de partager l'amour de la poésie et de la sagesse avec des personnes du monde entier. Car se croisent ici, dans cet espace virtuel, des lectrices et lecteurs qui viennent de France et du Canada, mais aussi des États-Unis, de Russie, d'Estonie, de Chine, du Maroc, etc. Où que vous soyez, je profite de l'occasion pour vous saluer et souhaiter que la poésie fasse ressortir notre humanité commune, notre unité par-delà les frontières et les différences apparentes.

On me demande parfois pourquoi "la joie d'être un âne" ? Certains fort perspicaces ont soupçonné une altération de "la joie d'être une âme"; ils n'ont pas tort mais ce fut involontaire. J'ai eu pour ma part envie de plaisanter avec la "joie d'être", qui me semble devoir échapper à l'esprit de sérieux, mais surtout je revendique le point de vue de l'âne, qui est aussi celui de l'âme. La poésie relève ici de l'insurrection de l'inutile et du gratuit - comme l'est la fraicheur du fond de l'air un soir d'été - devant l'omniprésence totalitaire de la rationalité marchande et technologique. Elle constitue toujours, de ce point de vue, une entreprise de libération qui veut donner voix au cœur et à ce qui nous relie à la nature originelle de la vie et de l'humain. 


mardi 21 juillet 2015

Âne aphone

Voici l'âne atone tant il trouve la vie monotone. Son ami l'Anatole n'arrive plus à le faire rire, et même la plus jolie des anatomies le laisse indifférent. Finira-t-il anachorète ? Non, car l'âne a sa logique qui n'est pas la notre. Mais voilà donc qu'il est sans voix à force de crier "vive l'âne Archie !". Ô âne aphone, garde-toi de l'anathème !

dimanche 19 juillet 2015

Chambre


Chambre sans toi

Lit vide
Des lys passés
Chablis renversé
Lituanie
Ciurlionis
Délivre-moi!

Chambre sans toit

Ciel d'opaline
Souffle d'hélices
Où danse la liane
Corde lisse à mon corps envolé
Liberté mon Ile
Délie-moi...

Chambre Cent trois

Littoral
Parfum d'héliotrope
Au verre de Lalique
La Vestale s'applique
L'Italie des Rois!

L'Ici avec toi...


Cygne Blanc

vendredi 17 juillet 2015

La lisière du vaste été

Les arbres de l'infinie douleur
Les nuages de l'infinie joie
Se donnent parfois signe de vie
À la lisière du vaste été.

Les alouettes passent à travers
Sans rien saisir de leurs paroles
Une source les retiendra seule
Pour donner à boire aux morts.

François Cheng

jeudi 16 juillet 2015

Oeuvre obscure

J'ai sculpté l'obscurité. J'ai cherché à lui donner une forme, un visage. Je l'ai travaillée avec patience, et elle s'est laissée faire. Comme je croyais être arrivé à lui modeler un corps, celui-ci a éclaté comme une bulle de savon, m'éclaboussant d'un rire frais. Là où se tenait mon œuvre obscure, il n'y avait plus qu'une lueur dansante de joie, nue comme au premier matin du monde.

mardi 14 juillet 2015

Lit douillet


Le jour du 14 Juillet
Je reste dans mon lit douillet.
La musique qui marche au pas
Cela ne me regarde pas.
Je ne fais pourtant de mal à personne
En n'écoutant pas le clairon qui sonne.
Mais les braves gens n'aiment pas que
L'on suive une autre route qu'eux
Tout le monde me montre au doigt
Sauf les manchots ça va de soi. 

Georges Brassens


La Mauvaise Réputation

lundi 13 juillet 2015

Nuages argentés


N’oubliez pas, même si vous êtes occupés, même si vous traversez la cour à la hâte, absorbés par vos tâches urgentes, n’oubliez pas de lever la tête un instant et de jeter un œil à ces immenses nuages argentés et au paisible océan bleu dans lequel ils nagent.

Rosa Luxemburg

dimanche 12 juillet 2015

Soleil de minuit


La mort viendra et elle aura tes yeux de braise. Ils éclaireront le chemin comme des phares incandescents, lancés à la poursuite de l'éternité. Les couleurs du temps s'enfuiront devant tant d'ardeur à ne pas être - même le vent ne saurait les rattraper. Au détour d'un tournant, la route elle-même s'effacera et nous plongerons dans le vide, les yeux grand ouverts tandis qu'enfin se lèvera le soleil de minuit.

vendredi 10 juillet 2015

Points de résistance


Si l'on veut aujourd'hui savoir à quoi ressemble l'âme, il faut chercher dans les images anciennes, celles des mineurs aux yeux de porcelaine blanche roulant dans la chair noire, ou celles des nouveaux-nés sidérés aux berceaux enflammés de dentelles. Les livres sont des huttes pour les âmes, des mangeoires pour les oiseaux de l'éternel, des points de résistance.
Christian Bobin, un assassin blanc comme neige

jeudi 9 juillet 2015

Devinette existentielle

Avez-vous besoin de savoir où vous allez pour y aller ? 

Si oui, vous êtes perdu. 

Si non, vous êtes déjà arrivé !

mardi 7 juillet 2015

Apesanteur

Il faut chaque jour quelques bribes de poésie pour contrebalancer le poids d'ombre du monde.

dimanche 5 juillet 2015

La solution


Suite à l'insurrection du 17 juin 1953 en République Démocratique d'Allemagne (RDA), Bertolt Brecht écrivit ce poème qui est encore d'une actualité brûlante :

Après l'insurrection du 17 juin,
Le secrétaire de l'Union des Écrivains
Fit distribuer des tracts dans la Stalinallée.
Le peuple, y lisait-on, a par sa faute
Perdu la confiance du gouvernement
Et ce n'est qu'en redoublant d'efforts
Qu'il peut la regagner.
Ne serait-il pas
Plus simple alors pour le gouvernement
De dissoudre le peuple
Et d'en élire un autre ?

Bertolt Brecht

samedi 4 juillet 2015

vendredi 3 juillet 2015

Ivresse de l'immense


Survivre au désir
Porter la soif
   plus loin que l'oasis

À l'orée de l'ombrage
   et du bruissement
Céder sans remords

À l'âpre ivresse de l'immense...
François Cheng

mercredi 1 juillet 2015

À Antoine


Le son du moteur couvre la voix de l'homme
Quelques bribes lui parviennent...
Dans le cabine où la chaleur se mesure au cube
Dilue les frontières
La gravité semble quitter son corps
Les yeux mi-clos ses paupières tamisent les éclats de verre

De cette lumière insupportable de blancheur

Au compteur l'aiguille oscille
Direction Apesanteur

L'oiseau quitte sa cage
Vertige

Aux commandes l'homme ne répond plus
Le moteur s'est tut

Nulle part
Sommes-nous

L'impression de franchir les murs du Temps
Criblé de particules
Le véhicule tangue doucement
Et cette lumière aveuglante
Qui porte la légèreté à son paroxysme

Lui ne voit que ses yeux
Papillon
Immobile

Ce cri
Avant la chute
Le déchirement de l'air
En un éclair
La brûlure ravive son corps

Le jour tombe
Son regard se pose
L'homme à ses côtés semble désemparé

Les débris épars de l'appareil

Le Désert

Sa voix

Sarah

Dessine-moi
Une Rose

La jeune femme retire son voile
Elle découvre sur le sable
Une magnifique rose des vents...


À Antoine de Saint-Exupéry, Cygne blanc